Peut-on filmer le chemin d'accès à sa proprité ?
-Vidéosurveillance et vie privée :
Filmer un chemin commun constitue un trouble manifestement illiciteCass. 3e civ., 10 avril 2025, n° 23-19.702
Introduction
La Cour de cassation a rendu, le 10 avril 2025, une décision importante en matière de vidéosurveillance et respect de la vie privée. Elle rappelle que filmer un chemin commun depuis une propriété privée constitue un trouble manifestement illicite, dès lors que la captation dépasse les limites de la propriété du vidéaste.
Cette décision, rendue sur le fondement de l’article 9 du Code civil, vient confirmer une position jurisprudentielle constante, tout en soulevant la question du juste équilibre entre sécurité des biens et respect de la vie privée.
Les faits et la procédure
Un particulier avait installé une caméra de surveillance sur sa propriété, orientée de telle sorte qu’elle captait les images d’un chemin commun emprunté par le voisinage.
Estimant que leur vie privée était ainsi violée, les voisins ont saisi le juge des référés pour trouble manifestement illicite, sur le fondement de l’article 9 du Code civil.
La cour d’appel, tout en reconnaissant la captation d’images extérieures à la propriété, avait rejeté la demande, considérant que le dispositif n’était pas excessif.
La Cour de cassation casse l’arrêt, reprochant aux juges du fond de ne pas avoir tiré les conséquences légales de leurs propres constatations : la simple captation d’un lieu accessible aux tiers suffit à caractériser le trouble manifestement illicite.
L’apport de la décision
La troisième chambre civile réaffirme ici un principe clair :
« La captation d’images au-delà des limites de la propriété privée, notamment sur un chemin commun, constitue par elle-même un trouble manifestement illicite. »
Cette décision s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence antérieure, notamment Cass. 3e civ., 11 mai 2011, n° 10-16.967, qui posait déjà l’interdiction de filmer des espaces accessibles au public ou aux voisins depuis une propriété privée.
Intérêt pratique et portée
Cette solution présente l’avantage d’une grande lisibilité :
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le juge n’a pas à rechercher une intention malveillante du propriétaire de la caméra ;
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l’atteinte à la vie privée est caractérisée dès que la captation dépasse le cadre strictement privé.
Cependant, la décision laisse ouverte la question de la proportionnalité : qu’en est-il lorsque le dispositif vise à protéger les biens contre des intrusions répétées ?
Une réflexion demeure sur la conciliation entre sécurité et vie privée, notamment dans les zones où les propriétés sont contiguës ou les chemins partagés.
Références juridiques
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Article 9 du Code civil – Chacun a droit au respect de sa vie privée.
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Cass. 3e civ., 11 mai 2011, n° 10-16.967
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Cass. 3e civ., 10 avril 2025, n° 23-19.702
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